Le barcode ADN de la raie aigle léopard de Polynésie française entraîne son changement d'identité.
La raie aigle léopard ou Fai Manu est une des sept espèces de raies présentes dans les eaux de Polynésie française. Longtemps considérée comme une seule espèce appelée Aetobatus narinari, elle a fait l’objet d’une étude génétique par Richards et al. (2009) qui a mis en évidence un complexe d’espèces cryptiques* composé d'au moins deux espèces distinctes. Une révision taxonomique de White et al. (2010) redétermine les différentes appellations à attribuer aux raies aigle léopard dans le monde : A. narinari est attribuée aux raies de l’Atlantique et du Pacifique est ; Aetobatus ocellatus est attribuée aux raies de l’Indo-Ouest Pacifique.
Dans le cadre de son Diplôme EPHE intitulé « La raie aigle léopard Aetobatus sp. en Polynésie française : écologie et interactions avec les activités anthropiques », Cécile Berthe a réalisé des prélèvements de tissus de raies aigle léopard dans les archipels de la Société et des Tuamotu. Ces prélèvements, dont les analyses génétiques ont été effectuées sous la responsabilité du Dr. Samuel Iglésias à la Station de biologie marine de Concarneau, ont démontré que la raie aigle présente dans nos eaux polynésiennes doit être nommée A. ocellatus et non plus A. narinari comme par le passé. Les zones de contact ou d'éventuels recouvrements géographiques de ces deux espèces restant méconnues, nous devons rester attentifs à toute observation effectuée dans des zones non échantillonnées, en particulier l’archipel des Marquises, connu pour sa grande biodiversité (voir article sur les raies Manta). Les données vont être intégrées à la base de données « Moorea Biocode » (CRIOBE - Gump), complétant ainsi l’inventaire de la biodiversité de Moorea, commencé en 2008. Cette étude vient rappeler que la dénomination d'une espèce est une donnée fondamentale en biologie dont les applications, notamment en termes de législations relatives à la pêche ou bien à la conservation d'espèces menacées, peuvent avoir de lourdes conséquences en cas de mauvaise attribution d'un nom.
*espèces cryptiques : populations non interfécondes mais présentant de grandes similitudes morphologiques